Le Canada est un grand pays dont la grande majorité des habitants sont anglophones bien qu'il y ait deux langues officielles. La seule province canadienne réellement francophone est le Québec. Les relations entre les québécois et les anglophones sont parfois difficiles — c'est le sujet de la comédie « Bon Cop Bad Cop ».
Le titre du film, « Bon Cop Bad Cop », est un jeu de mots sur l’expression « good cop bad cop » qui se réfère à une technique d'interrogatoire employée par la police: un policier – le « méchant » – interroge agressivement le suspect puis s'absente, passant le relais à son collègue – le « gentil » – qui adopte une approche plus conciliante.
Le film est à l'image de son titre: une moitié en anglais, l’autre en français. (Avec sous-titres dans l'une ou l'autre langue, bien sûr.) Les protagonistes sont Martin Ward (Colm Feore) et David Bouchard (Patrick Huard). Martin est un policier ontarien très respectueux des règles. David est un policier québécois qui les invente. Leurs personnalités sont complètement différentes, mais ils sont forcés de travailler ensemble quand un cadavre est découvert sur la frontière Ontario-Québec, une moitié dans l’Ontario et l’autre au Québec. Leur première rencontre n’est pas harmonieuse, et l’humour de la scène est vraiment noir.
Sur les lieux du crime |
Mais c’est seulement le premier meurtre. On découvre un tatouage sur le cadavre, après quoi une seconde victime est découverte, portant un autre tatouage. C’est le début d'une série de meurtre liés au hockey. Le mobile est bien trouvé, surtout si vous connaissez ce sport. On y trouve des blagues amusantes et intelligentes sur Eric Lindros, Wayne Gretzky, et autres. Par exemple, le célèbre humoriste canadien Rick Mercer, joue un rôle trop important pour relever de la figuration, mais pas assez pour être en vedette. Son personnage moque Don Cherry, un commentateur qui connait bien son hockey, mais qui est franchement un peu raciste, surtout envers les joueurs non-canadiens et québécois.
L’histoire est intéressante et la comédie est généralement bonne, parfois très canadienne — certaines blagues ne fonctionnent que si l'on connait bien le hockey, ou le Canada. L’énigme quant à elle n’est pas terrible — les rares indices qui sont apportés seront plus facilement déchiffrés par quelqu’un ayant une bonne connaissance du hockey, et le choix du meurtrier est franchement arbitraire.
Malgré les problèmes avec l’énigme, le film est bon. Le réalisateur, Érik Canuel, fait du bon boulot. L’action est bien menée (il y a quelques explosions et des chasses…), et lisible. Trop de films actuels copient le style des films « Bourne »—l’action est si rapide qu’on ne sait jamais qui fait quoi et où. Dans le film « Quantum of Solace », par exemple, une certaine scène avec des avions aurait pu prétendre au statut de classique. Malheureusement, je n’ai toujours aucune idée de ce qui pouvait bien s'y passer. Canuel ne fait pas cette erreur et s'en sort, dans l'ensemble, plutôt bien.
Les acteurs sont bons. Feore et Huard fonctionnent très bien ensemble —comme Nero Wolfe et Archie Goodwin, leurs personnalités sont si différentes que leurs rapports n'en sont que sont plus intéressants et percutants. Les autres acteurs sont aussi compétents, et les camées sont amusants—mais je parle d’une perspective canadienne, ou je sais qui la personne est et quelle personne réelle le film moque gentiment.
« Bon Cop Bad Cop » n’est pas le meilleur film que j’aie vu, mais il est amusant et donne une bonne idée des relations entre anglophones et francophones. Si vous voulez lire un bon polar avec un thème similaire, je recommande les romans de Louise Penny. J'ai découvert sur son site web, que les livres « A Fatal Grace » (un crime impossible, ou la victime est électrocuté sur un lac gelée pendant un match de curling) et « Still Life » (je ne l’ai pas lu encore) ont été traduits en français: le premier, sous le titre « Sous la Glace », et le second sous le titre « Nature morte » (le titre alternatif est « En plein cœur »). « Sous la Glace » propose un bon crime impossible, mais comme les enquêteurs assemblent le puzzle une pièce à la fois, la réponse au « comment? » précède de beaucoup celle du « qui ? ». Je préfère pour ma part un autre livre de Penny, « The Murder Stone » (pas encore traduit), dans lequel une personne est tuée par la chute d'une statue, et où la solution est révélée en une seule fois à la fin du livre. Je l’ai comparée à Agatha Christie, et je pense que c’est une comparaison justifiée. Penny joue franc-jeu avec le lecteur, comme Christie, et elle comprend bien l’esprit canadien.
Je viens de voir le film que j'ai trouvé très amusant. Le duo bilingue fonctionne très bien. Il y a sans doute quelques allusions spécifiques à la culture canadienne qui m'ont échappé, mais j'ai été en mesure d'apprécier l'humour la plupart du temps.
RépondreEffacerParfois, les répliques en anglais étaient pour moi plus aisément compréhensibles que celles en français du Québec, ce qui est un comble!
La seule chose qui est moins réussie, c'est l'intrigue policière proprement dite. Certes, le mobile du tueur est original et savoureux, mais pour le reste, c'est un thriller plutôt conventionnel avec même lors du final un classique compte à rebours potentiellement meurtrier. Mais peu importe, la qualité du film réside dans ses dialogues délectables et on passe un bon moment de divertissement.
D'autre part, je prends note pour "The Murder Stone" de Louise Penny dont j'ai lu avec intérêt ton article enthousiaste sur ton autre blog.